Simulation des variations de débits et de l’activité de crue du Rhône amont à partir de l’information atmosphérique de grande échelle sur le dernier siècle et le dernier millénaire

Thèse soutenue par Caroline Legrand en 2024

Direction de thèse : Benoit Hingray, co-encadrement : Bruno Wilhlem, Pierre Sabatier

Thèse soutenue le 10 avril 2024,

Résumé : Les crues sont des aléas naturels extrêmement destructeurs qui peuvent avoir des répercussions considérables sur les écosystèmes et les sociétés. L’activité et l’intensité des crues pourraient être amplifiées par le changement climatique en cours. Quantifier les évolutions possibles pour les décennies à venir est cependant difficile. L’approche classique consiste à estimer ces évolutions à partir de projections hydrologiques obtenues par simulation à partir des scénarios météorologiques produits pour différents scénarios climatiques futurs. Ces scénarios météorologiques, qui doivent, entre autres choses, être adaptés aux échelles spatiales et temporelles des bassins considérés, sont typiquement produits avec des modèles de descente d’échelle à partir des conditions atmosphériques de grande échelle simulées par des modèles climatiques. Ces modèles de descente d’échelle sont soit dynamiques soit statistiques. La possibilité de produire, avec ce type de modèles, des scénarios météorologiques pertinents est supposée acquise mais est rarement évaluée.

Dans cette étude, nous avons évalué la capacité de deux chaînes de modélisation à reproduire, au cours du dernier siècle (1902-2009) et à partir de l’information atmosphérique de grande échelle uniquement, les variations temporelles observées des débits et des événements de crue du bassin versant du Rhône amont (10 900 km2). Les chaînes de modélisation sont constituées (i) de la réanalyse atmosphérique ERA-20C, (ii) soit du modèle de descente d’échelle statistique SCAMP, soit du modèle de descente d’échelle dynamique MAR et (iii) du modèle glacio-hydrologique GSM-SOCONT.

Les évaluations sur les températures et les précipitations de bassin journalières soulignent la nécessité d’une correction de biais pour les deux modèles de descente d’échelle. Pour éviter des simulations non pertinentes de la dynamique du manteau neigeux, en particulier pour les hautes altitudes, la correction des biais est nécessaire non seulement pour les scénarios de précipitations et de températures mais aussi pour les scénarios de gradients altimétriques de température pour la chaîne de descente d’échelle dynamique.

Les évaluations sur l’hydrologie des bassins montrent que les variations multi-échelles (journalières, saisonnières et interannuelles) observées des débits et les situations hydrologiques de basse fréquence (séquences d’étiage et événements de crue) sont globalement bien reproduites pour la période 1961-2009. Pour la première moitié du siècle, l’accord avec les débits de référence est plus faible, probablement en raison de la moindre qualité des données (données ERA-20C et de débits) et/ou de certaines hypothèses et choix de modélisation (e.g. calibration basée sur des signatures hydrologiques, hypothèse de stationnarité). Ces résultats ainsi que ceux sur les variations de l’activité de crue obtenus sur le siècle dernier permettent d’envisager l’utilisation des chaînes de modélisation pour des contextes climatiques différents.

Dans une dernière partie, nous avons simulé les variations de l’activité de crue sur l’ensemble du dernier millénaire en utilisant les sorties d’un modèle climatique rendues disponibles par le projet PMIP (Paleoclimate Modelling Intercomparison Project). Les sorties du modèle climatique CESM Last Millennium Ensemble, composé de 12 membres, ont été statistiquement descendues en échelle au pas de temps journalier sur la période 850-2004 avec le modèle SCAMP (pour des raisons de coûts de calcul) et utilisées comme forçages dans le modèle GSM-SOCONT.

Les variations de l’activité de crue du Rhône amont simulées sur le dernier millénaire ont été comparées à celles reconstituées à partir d’archives sédimentaires du lac du Bourget. Les résultats obtenus suggèrent que les variations de l’activité de crue reconstituées sur cette période pourraient être liées à la variabilité interne du climat et non pas à un quelconque forçage atmosphérique de grande échelle.

Legrand, C, Hingray, B., Wilhelm, B.†, Menegoz, M., 2024. Assessing downscaling methods to simulate hydrologically relevant weather scenarios from a global atmospheric reanalysis. Case study of the Upper Rhone River (1902-2009). Hydrol. Earth Syst. Sci. https://doi.org/10.5194/hess-28-2139-2024