Romane CARACCIOLO
soutenance en 2023

Distribution spatiale et temporelle des contaminants émergents et identification des sources dans les systèmes fluviaux Saigon-DongNai et vers le littoral, Sud Vietnam
Occurrence and spatial distribution of multi-class emerging contaminants in the Saigon Dong Nai Rivers, Vietnam
Encadrants/Supervisors : Christine Baduel et Julien Némery
Résumé
Les contaminants d’intérêt émergent (CECs) - incluant les produits pharmaceutiques, produits de soins personnels, pesticides, substances per- and polyfluoroalkylées (PFAS), plastifiants ainsi que divers produits industriels, ont été détectés dans les milieux aquatiques à l’échelle mondiale à des concentrations capables de causer des effets néfastes sur des organismes non-ciblés. Les centres urbains sont des ’’hotspots’’ de contamination concentrant les émissions des activités anthropiques (domestiques, industrielles, agricoles, sanitaires, etc…). Dans les zones tropicales, l’urbanisation rapide, illustrée par le développement de nombreuses megacities, génère des rejets accrus de CECs. A ce jour, très peu de données ont été publiées sur la présence et le devenir des CECs dans les milieux aquatiques tropicaux et l’impact des nouvelles megacities reste encore faiblement caractérisé.La rivière Saigon, dans le sud du Vietnam, est soumise à de fortes pressions anthropiques liées au développement de la dynamique megacity d’Ho Chi Minh (> 9 millions d’habitants). La qualité de l’eau de la rivière est particulièrement affectée par le rejet d’eaux usées domestiques et industrielles non traitées qui libèrent en continu une myriade de CECs potentiellement toxiques. Afin de combler les lacunes actuelles dans les zones tropicales, ce travail vise à : (i) étudier l’occurrence et la distribution spatio-temporelle des CECs dans le continuum de la rivière Saigon, (ii) évaluer l’impact de la megacity d’Ho Chi Minh sur la rivière Saigon et son estuaire, (iii) évaluer le risque environnemental engendré par les CECs détectés, et (iv) établir une liste de substances prioritaires pour un suivi futur.Quatre campagnes d’échantillonnage ont été menées en 2019 et 2020 sur le continuum de la rivière Saigon (longueur totale de 140 km) durant la saison des pluies et la saison sèche. Lors de chaque campagne, des échantillons d’eau (500 mL) ont été prélevés sur 27 sites de la rivière et sur 4 sites situés à l’embouchure des principaux canaux du centre urbain. Une méthode multi-résidus ciblant 219 CECs (PPCP, pesticides, produits industriels, plastifiants) a été appliquée après concentration des échantillons par extraction sur phase solide. Des analyses statistiques multivariées et une évaluation des risques environnementaux (individuels et cumulés) ont été réalisées sur l’ensemble des données. En outre, des analyses biologiques ont été combinées avec les analyses chimiques (échantillons de la saison sèche de 2020) pour explorer la toxicité de mélange des contaminants et déterminer la contribution des CECs détectés aux effets biologiques mesurés.Une importante variabilité spatiale a été observée pour les différentes classes de CECs, soulignant la présence de mélanges chimiques variés le long du continuum. La majorité des contaminants étaient récurrents dans le système et 45 contaminants principaux ont été détectés de l’amont à l’estuaire durant les deux saisons. Les canaux urbains ont été identifiés comme la principale source de contamination vers la rivière. Des apports importants de pesticides ont été mesurés près de l’estuaire, accrus pendant la saison des pluies. Une contribution majeure de ce travail a été l’utilisation de deux méthodologies différentes (bioessais et évaluation des risques) pour évaluer le risque individuel et cumulatif des CECs détectés. Les principaux CECs identifiés comme porteurs de risque étaient les pesticides diuron, fipronil, métolachlore et terbutryn, et les produits pharmaceutiques fexofénadine, acide méfénamique et telmisartan.Ce travail pionnier a permis d’identifier des contaminants récurrents et toxiques et constitue une base pour le suivi futur de la contamination et pour des études d’écotoxicologie. Il a également permis d’identifier des sites pertinents pour des futures campagnes d’échantillonnage (tels que les canaux de la ville) où les dynamiques des CECs pourrait être étudiée de manière plus approfondie.