L’aléa inondation du Haut-Rhône réévalué avec des débits de crues reconstitués à partir de sédiments lacustres

L’évaluation robuste de l’aléa inondation est cruciale pour la bonne cartographie des risques d’inondation et pour la conception des infrastructures hydrauliques. Le choix d’une solution acceptable et rentable pour de telles évaluations dépend de l’estimation des quantiles pour différentes caractéristiques d’inondations, généralement des débits maximaux. Cependant, les séries de jaugeages couvrent généralement une période limitée et, par conséquent, les estimations de quantiles associés aux périodes de retour élevées sont soumises à de grandes incertitudes. Pour surmonter cette limite, des séries d’inondations reconstituées à partir d’archives historiques, botaniques ou géologiques (voir article précédent) peuvent être incorporées. Dans cette étude, nous proposons une nouvelle approche qui i) combine des séries classiques d’observations avec des débits de crues (du Rhône) reconstitués à partir de sédiments lacustres (Lac du Bourget, Alpes, France) et ii) qui propage les incertitudes liées à la méthode de reconstitution de l’estimation des quantiles extrêmes.
L’approche bayésienne est adoptée afin de traiter correctement le caractère non systématique des données de débits reconstitués, ainsi que les incertitudes liées à la méthode de reconstitution. Bien que cette méthodologie ait déjà été appliquée à des débits reconstitués à partir de documents historiques, de cernes d’arbres ou de sédiments fluviaux, l’application aux sédiments lacustres devait être testée car cette archive offre l’avantage de fournir des séries longues et continues de crues passées. Les volumes de sédiments reconstitués étant sujets à des erreurs de mesure, nous évaluons et prenons en compte cette incertitude, ainsi que l’incertitude liée à la méthode de reconstitution, l’incertitude paramétrique et les erreurs de la courbe de tarage pour les débits mesurés en propageant ces incertitudes à travers la chaîne de modélisation. Les débits maximaux reconstitués semblent largement dépasser les valeurs des observations, atteignant des valeurs d’environ 2600, 4200, 2450 et 2500 m3/s en 1689, 1711, 1733 et 1737 respectivement (Figure 1), dates qui correspond aux inondations catastrophiques connues historiquement. Enfin, les quantiles extrêmes sont estimés à l’aide i) des débits maximaux mesurés (1853-2004) uniquement, puis ii) combinés aux informations sédimentaires (1650-2013 ; Figure 1). La comparaison des estimations obtenues démontre la valeur ajoutée de l’information sédimentaire. En particulier, les quatre inondations catastrophiques historiques sont très peu probables si seules les observations directes sont prises en compte pour les estimations quantiles.

Référence :

Evin G., Wilhelm B., Jenny J.P. (2018) Flood hazard assessment of the Rhône River revisited with reconstructed discharges from lake sediments, Global and Planetary Change172, 114-123 - PDF