Contribution substantielle de l’iode à la destruction de l’ozone dans l’Arctique

La chimie de l’iode joue un rôle majeur dans le contrôle de l’ozone troposphérique dans l’Arctique, selon une étude publiée dans la revue Nature Geosciences, réalisée au cours de l’expédition MOSAiC (Multidisciplinary drifting Observatory for the Study of Arctic Climate).

Le Polarstern ancré sur une plaque de glace dans l’océan Arctique. Crédits Hans-Werner Jakobi

 

La diminution de l’ozone stratosphérique, en particulier dans l’Antarctique, est bien connue. Les émissions anthropiques de chlorofluorocarbones (CFC) en sont le principal facteur. Toutefois, des phénomènes de destruction de l’ozone similaires sont observés près de la surface de la Terre. Au cours de ces périodes d’appauvrissement, les concentrations d’ozone tombent pratiquement à zéro. Jusqu’à récemment, on pensait que ces événements d’appauvrissement à la surface se produisaient principalement en raison de la destruction catalytique par un seul type d’halogène, le brome, qui est émis dans l’atmosphère depuis la région de la banquise.

Contrairement au brome, l’effet d’une autre espèce d’halogène, l’iode, n’était pas bien compris ni quantifié. Des chercheurs de différents pays ont mené des observations de mars à octobre 2020 sur un navire dans la région du Haut-Arctique et ont montré que l’iode renforce la destruction de l’ozone troposphérique au printemps. En effet, à l’aide d’un modèle chimique, ils ont montré que les réactions chimiques entre l’iode et l’ozone sont le deuxième plus grand contributeur à la perte d’ozone de surface, après la perte initiée par la photolyse de l’ozone, et devant le brome. Cela change le paradigme de plusieurs décennies sur les facteurs de perte d’ozone photochimique dans l’Arctique.
Leur recherche suggère également que l’augmentation de la charge d’iode dans l’atmosphère due à l’accroissement des émissions anthropiques d’iode dans l’océan induites par l’ozone, ainsi que l’amincissement et le rétrécissement de la glace de mer arctique attendus dans un avenir proche, entraîneront probablement une augmentation des émissions d’iode. Ces résultats indiquent que la chimie de l’iode pourrait jouer un rôle de plus en plus important à l’avenir et doit être prise en compte pour une quantification précise du bilan d’ozone dans l’Arctique, qui agit également comme un gaz à effet de serre.

L’étude s’inscrit dans le cadre d’une collaboration internationale qui a effectué des observations au cours de l’expédition MOSAiC. Il s’agissait de la plus grande expédition polaire de l’histoire, menée à bord du brise-glace de recherche allemand Polarstern, qui a quitté la Norvège pour passer un an à dériver dans l’océan Arctique - prisonnier de la glace. L’objectif de l’expédition MOSAiC était d’observer de plus près l’Arctique, épicentre du réchauffement climatique, et d’en tirer des enseignements fondamentaux pour mieux comprendre le changement climatique mondial. Des centaines de chercheurs de 20 pays ont participé à cette entreprise exceptionnelle.

Cette étude est le fruit d’une étroite collaboration entre les institutions suivantes :
1. Department of Atmospheric Chemistry and Climate, Institute of Physical Chemistry Rocasolano, CSIC, Madrid, Spain.
2. Indian Institute of Tropical Meteorology, Ministry of Earth Sciences, Pune, India.
3. Extreme Environments Research Laboratory, École Polytechnique Fédérale de Lausanne Valais Wallis, Sion, Switzerland.
4. Institute for Atmospheric and Earth System Research, INAR – Physics, University of Helsinki, Helsinki, Finland.
5. The Cyprus Institute, Aglantzia, Cyprus.
6. Institute of Environmental Physics, University of Bremen, Bremen, Germany.
7. Institute for Interdisciplinary Science, National Research Council, FCEN-UNCuyo, Mendoza, Argentina.
8. Department of Environmental Science, iClimate, Aarhus University, Roskilde, Denmark.
9. Department of Marine Sciences, University of Gothenburg, Gothenburg, Sweden.
10. Department of Meteorology and Geophysics, University of Vienna, Vienna, Austria.
11. Cooperative Institute for Research in Environmental Sciences, University of Colorado Boulder, Boulder, CO, USA.
12. NOAA Physical Sciences Laboratory, Boulder, CO, USA.
13. Institute of Arctic and Alpine Research, University of Colorado, Boulder, CO, USA.
14. Bigelow Laboratory for Ocean Sciences, Boothbay, ME, USA.
15. Institute for Geosciences and Environmental Research (IGE), University Grenoble Alpes/CNRS/Grenoble INP/IRD, Grenoble, France.
16. Paul Scherrer Institute, Villigen, Switzerland.
17. Boulder AIR, Boulder, CO, USA.
18. JH Atmospheric Instrument Design, Boulder, CO, USA

Référence
Benavent et al., Substantial contribution of iodine to Arctic ozone destruction, Nature Geosciences, 2022, 10.1038/s41561-022-01018-w
https://rdcu.be/cVE70
Photo credit : Credits : Michael Gutsche
Copyright : Alfred-Wegener-Institut / Michael Gutsche (CC-BY 4.0)

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