Abdoulaye SAMAKÉ
Soutenance en 2019

Étude des processus de transfert vers l’atmosphère et de l’impact sanitaire des émissions biogéniques particulaires
Encadrants : Jean Martins, Gaelle Uzu (Chianti-IGE) et JL Jaffrezo (Chianti-IGE)}
Résumé
Les particules en suspension dans l’air (notées « PM » pour « Particulate Matter ») sont aujourd’hui au cœur des préoccupations sociétales en raison de leur impact majeur sur la santé publique et leur forte participation au changement climatique. La matière organique (MO) représente généralement la première composante en masse des PM mais reste encore très mal appréhendée, en particulier la fraction organique d’origine biogénique primaire (PBOA). Des sucres primaires sont proposés comme des traceurs moléculaires pour étudier les processus de transport atmosphérique des PBOAs ainsi que pour estimer leur contribution à la masse totale des PM. Cependant, les connaissances sont encore très limitées sur leurs distributions spatiales et temporelles (i.e., cycles journaliers, saisonniers et annuels), leurs principales sources d’émissions, ou encore les facteurs environnementaux qui déterminent leurs concentrations atmosphériques. Par ailleurs, si la compréhension du potentiel oxydant (PO) —proxy de l’effet sanitaire des PM— inhérent à la composante chimique des aérosols a relativement bien avancé ces dernières années, la contribution de cette fraction PBOA reste est très mal connue. Contribuer à l’avancement des connaissances sur ces différents aspects constitue l’objectif de ce travail de thèse. D’un point de vue méthodologique, nos questions ont été abordées par une approche interdisciplinaire, qui a impliqué le couplage de l’exploitation statistique d’une large base de données unique avec le couplage de campagnes de terrain spécifiques et la mise en œuvre d’une stratégie expérimentale novatrice développée pour l’étude simultanée des caractéristiques chimiques et microbiologiques des échantillons collectés.
Dans une première partie basée sur l’exploitation d’une large base de données, nous avons montré que les PBOAs constituent une fraction très importante des PM en France, indépendamment de la typologie de l’environnement, contribuant en moyenne annuelle à 13 ± 4 % de la MO dans les PM10. Nous avons montré une similitude entre les évolutions temporelles de concentrations et de ratios entre sucres primaires pour des sites localisés dans une même région géographique (jusqu’à une distance inter- sites d’environ 200 km). Ces observations indiquent que la source PBOA est très homogène spatialement sur des distances cohérentes avec celles de grands types d’écosystèmes. Cette observation a ensuite été validée par une expérimentation basée sur deux échantillonnages annuels de terrain qui nous a permis de démontrer (i) que les évolutions journalières des concentrations atmosphériques en sucres primaires sont déterminées par seulement quelques taxons microbiens atmosphériques, variables d’un point de vue regional ; et (ii) que ces taxons proviennent, respectivement, de la flore locale et régionale pour les sites d’étude qui sont directement influencés et non influencés par les activités agricoles. Enfin, dans le cadre d’étude de PO, nos résultats ont permis de démontrer (i) que tous les bioaérosols modèles testés possèdent un PO intrinsèque significatif comparable, pour certaines espèces, à celui de composants chimiques atmosphériques modèles connus pour leur forte reactivité redox ; et (ii) qu’ils sont capables d’influencer significativement le PO de PM chimiques modèles ou collectées en conditions réelles.
Ces travaux apportent un nouveau regard sur l’importance massique des PBOAs et des nouvelles connaissances sur les sources et processus dominants conduisant à leur introduction dans l’atmosphère, ainsi que l’influence des facteurs environnementaux sur ces processus. L’ensemble des résultats de ce travail plaide pour une prise en compte systématique des PBOAs dans les modèles de chimie atmosphérique pour une meilleure prédiction de la qualité de l’air.