Habilitations à diriger des Recherches soutenues (depuis 2003)

Abstract: En quelques décennies, la qualité de l'air est devenue un problème majeur de santé publique pour toutes les sociétés, tant au Sud, qu'industrielles et développées . Des études épidémiologiques ont établi que la majeur partie des effets chroniques sanitaires résultant de la pollution de l'air sont attribuables aux particules . La plupart de ces études et la réglementation actuellement en vigueur en Europe utilisent la concentration massique des PM (pour Particulate Matter) comme indicateur et outil d'alerte sanitaire. Cependant, il est maintenant clair qu'une grande partie de la masse des particules ambiantes est constituée de composants de faible toxicité, tandis que les espèces réactives en trace peuvent être des contributeurs majeurs à leur toxicité. Il est de plus, évident que la composition, la spéciation chimique, la taille, l'état de surface et la solubilité des particules influencent fortement les effets pro-inflammatoires et les affections qui en découlent. La plupart de ces paramètres ne sont pas efficacement intégrés dans la mesure de la concentration massique de PM. La masse n'est donc sans doute pas le meilleur marqueur de l'impact sur la santé des particules atmosphériques bien qu'elle soit la mesure réglementaire pour prévenir l'exposition des populations.
Cependant, il n'existe pas encore de consensus sur une métrique alternative ou complémentaire qui fournirait des informations pertinentes sur les risques pour la santé, et qui pourrait être normalisée pour une utilisation dans le cadre réglementaire de surveillance de la qualité de l'air. La caractérisation de la spéciation chimique des particules est une option intéressante, mais sa mesure est longue et coûteuse, et de toute façon incomplète, puisque les particules renferment des centaines d'espèces chimiques différentes. Une autre option est la mesure du nombre de particules mais les technologies disponibles ont des seuils de coupure très bas, difficiles à calibrer et à maintenir, et les compteurs optiques présentent des artefacts pour les petits diamètres qui limitent leur fiabilité.
La communauté de chimie atmosphérique se penche depuis 2005 sur une mesure intégrative de plusieurs caractéristiques des PM en lien avec les effets sanitaires : la capacité intrinsèque des particules à oxyder un milieu biologique, dénommée “potentiel oxydant” des aérosols.

Abstract: L'assimilation de données a pour objectif de combiner différentes sources d'information sur un système –des observations et un modèle, généralement− pour en obtenir la meilleure description possible. Les méthodes d'assimilation sont nombreuses, mais le choix d'une méthode est guidée d'une part par le problème à résoudre, d'autre part par la différence de nature entre les observations et le modèle.
L'océanographie moderne, notamment sa branche opérationnelle, est caractérisée par des modèles de grande taille, coûteux, et un réseau d'observations très peu dense en comparaison de la résolution spatiale et temporelle des modèles. Dans la perspective de construire des réanalyses de la circulation de l'océan à haute résolution, la méthode d'assimilation doit être relativement peu coûteuse en moyens de calcul tout en tirant le profit maximal des observations existantes. Ainsi, pour estimer l'état de l'océan d'un jour donné, il faut idéalement tenir compte des observations futures. L'assimilation de ces observations est alors rétrospective.
L'essentiel de ma présentation portera sur le développement de ces méthodes d'assimilation rétrospectives de données. Dans un premier temps, je présenterai ces méthodes dans un formalisme général (Bayésien) puis dans le formalisme appliqué aux méthodes habituellement utilisées en océanographie, et plus généralement en géophysique. Dans un second temps, j'illustrerai les bénéfices de cette assimilation rétrospective de données en océanographie, d'abord dans le cadre d'une circulation océanique idéalisée, puis avec un modèle réaliste de la circulation en Atlantique Tropical.
Je consacrerai aussi une part significative de mon exposé aux recherches que j'ai amorcées récemment et que je propose de conduire dans le futur, portant sur l'assimilation des observations océaniques de nouvelle génération : couleur de l'eau et altimétrie et à large fauchée. Ces observations présenteront une nature singulièrement différente des observations actuelles, puisqu'elles seront de très haute résolution, localement denses en surface mais très peu denses en profondeur et/ou en temps. Je décrirai les quelques pistes que j'ai commencé à explorer, et celles que j'envisage d'explorer, pour développer les méthodes d'assimilation spécifiques à ces observations.

Abstract: L'étude des processus glaciaires nécessite un suivi de terrain pour comprendre les interactions entre les glaciers et leur environnement à des échelles fines de temps et d'espace. Un petit nombre de glaciers de référence est instrumenté dans différentes régions climatiques à l'échelle mondiale, permettant un suivi de leur bilan de masse et dans certains cas de leur bilan d'énergie de surface. Cependant, ce petit nombre constitue un obstacle à la connaissance de la relation entre les changements climatiques et l'évolution des glaciers à l'échelle d'un massif ou d'une région climatique. Il en est de même pour la quantification de la contribution des glaciers aux ressources en eau et au fonctionnement des bassins versants de haute altitude. Ainsi, aboutir à une prise en compte des processus et des changements glaciaires à l'échelle régionale nécessite un changement d'approche, et la télédétection s'avère être l'outil le plus approprié. Ce suivi à plusieurs niveaux est la stratégie mise en œuvre par le SO/SOERE GLACIOCLIM (INSU, IRD, OSUG, AllEnvi) et s'inscrit dans le cadre de la stratégie de surveillance établie internationalement par le Global Terrestrial Network for Glaciers (IUGG/IACS).Les résultats récents obtenus dans les Andes tropicales et Alpes occidentales montrent les avantages à combiner les informations recueillies à partir de «glaciers de référence» et celles obtenues par télédétection à l'échelle du massif, afin de mieux comprendre les causes de l'accélération de la diminution des glaciers au cours des dernières décennies. Ceci a notamment été rendu possible par le développement d'une méthode permettant de quantifier le bilan de masse annuel d'un glacier à partir de sa ligne d'équilibre mesurée par télédétection.Enfin, la question du devenir des glaciers de montagne est discutée. Simuler l'évolution à venir des glaciers nécessite de connaitre les épaisseurs de glace pour l'ensemble du glacier, de simuler les bilans de masse pour les années/décennies futures, et de prendre en compte la dynamique d'écoulement du glacier. Nous verrons quel est l'état des connaissances et des développements méthodologiques pour ces trois pré-requis indispensables, et comment les limites actuelles peuvent être outrepassées afin d'améliorer les estimations du devenir des glaciers de montagne.

Abstract: Le mercure (Hg) est un métal connu pour sa toxicité, ses facultés de concentration dans les chaînes alimentaires et son omniprésence dans l’environnement. Les conséquences des émissions de mercure sur les milieux récepteurs éloignés des sources sont mal comprises, autant en terme de processus de dépôts, de réactivité et d’échanges aux interfaces mais aussi sur les mécanismes biochimiques qui conduiront à ce qu’un atome de Hg émis soit transformé puis intégré dans une chaîne alimentaire située à des milliers de kilomètres de distance. Ce manuscrit présente notre approche du cycle du mercure en lien avec les régions polaires, mettant en avant les liens existant entre atmosphère et cryosphère. Nos travaux portent sur des observations atmosphériques en Arctique et Antarctique, le rôle des manteaux neigeux dans le transfert et la transformation du Hg, ainsi que sur l’utilisation des archives glaciaires afin d’étudier la composition passée de l’atmosphère. Le continent antarctique apparaît comme étant un vaste terrain d’exploration prometteur pour l’étude du cycle du mercure. En outre, nous montrons qu’il est désormais nécessaire d’aborder les manteaux neigeux non pas comme des réacteurs chimiques mais comme des écosystèmes à part entière.

Abstract: Les glaciers sous toutes leur formes ont toujours fasciné les hommes. Objets de craintes par le passé,
ils se sont progressivement transformés en terrain d'exploration et de découverte, pour finalement
aujourd'hui devenir, au moins dans nos montagnes, des lieux de fréquentation régulière pour les
alpinistes et les skieurs. Leur spectre de taille et de morphologie est large et présente tous les
intermédiaires imaginables entre les petits glaciers de quelques hectares et les calottes glaciaires de
plusieurs millions de km2 au niveau desquelles l'épaisseur de glace dépasse souvent les 3 000 m. Ce
gigantisme n'est pas sans conséquences environnementales. De telles surfaces englacées constituent
une des 'sphères' qui caractérisent le système climatique terrestre au même titre que l'hydrosphère,
l'atmosphère, ou encore la biosphère. Ainsi la cryosphère polaire joue un rôle fondamental dans le
fonctionnement de la machine climatique. Ne serait-ce que par ses propriétés radiatives qui font que ,
au dessus des calottes, près de 80 % de l'énergie solaire incidente est directement réfléchie alors que
ce même pourcentage chute aux alentours de 30% en moyenne au dessus des sols déglacés et même à
20% au dessus de la mer libre. Les interactions que développent les calottes polaires avec l'océan,
essentiellement au niveau des plate­formes de glace et des glaciers dits marins, sont elles aussi
fondamentales et conditionnent pour beaucoup la circulation thermo­haline, un élément important
dans le fonctionnement de la machine climatique terrestre. Enfin lorsque l'on intègre que ces régions
polaires sont des régions où les effets de seuil et les rétroactions positives sont importants (liés pour
l'essentiel aux propriétés physiques de la glace) on réalise toute l'importance de ces calottes et surtout
l'impact que peuvent avoir leurs changements. De plus, si la cryosphère est acteur du système
climatique, elle n'en reste pas moins sensible aux fluctuations de ce dernier, et ce, quelles qu'en soient
les causes. On s'inquiète donc tout naturellement de quel pourrait être le devenir de ces masses de
glace sous les effets du réchauffement climatique dorénavant avéré et surtout quelles pourraient être
les conséquences d'une variation significative de leur volume en terme de niveau des mers. Même si
une déstabilisation d'ensemble de l'Antarctique n'est pas aujourd'hui à l'ordre du jour, une perte de
masse de seulement 10% de la calotte entraînerait une élévation mondiale du niveau des mers de près
de 6 m !. C'est autant que ce que produirait la disparition totale de son homologue de l'hémisphère
Nord, le Groenland, qui lui, semble a priori montrer des signes plus tangibles de changements récents.
Autant de bonnes raisons à ajouter à la fascination que représentent ces objets pour justifier de
l'engouement des scientifiques pour l'étude de ces mastodontes.
Plus modestes, les glaciers de montagne ne sont pas en reste pour autant. En effet, même si ils sont
potentiellement moins impactants ils n'en sont pas moins très sensibles aux changements
environnementaux et notamment aux changements climatiques. Leur dimensions réduites se
traduisent par des temps de réponse beaucoup plus courts et une sensibilité accrue par rapport aux
calottes glaciaires, au point de mériter le qualificatif de bons indicateurs climatiques (ref ?). Autant
dire qu'ils bénéficient aussi d'une attention toute particulière de la part des scientifiques, et ce d'autant
plus qu'ils nous sont généralement plus proches et donc d'autant plus accessibles que leurs
homologues polaires. Enfin, une autre façon de témoigner des fluctuations climatiques s'exprime via le phénomène
d'archivage glaciaire par le biais duquel, de nombreuses informations sur les paléo­-conditions
environnementales peuvent être déduites, qu'ils s'agisse de la température par exemple ou encore de la
composition de l'atmosphère. La suprématie des calottes pour garantir les bonnes conditions de cet
archivage tient tout d'abord dans l'imposant rapport entre la quantité de glace disponible et la relative
faiblesse du bilan de masse annuel, au point qu'un forage comme celui de Dôme C a permis de
remonter les 800 000 dernières années de l'histoire du climat. Ensuite, à la différence de l'essentiel des
glaciers de montagne, les conditions de température vers l'intérieur des calottes interdisent toute fonte
et percolation limitant ainsi les processus de transformation post­-dépôt (souvent favorisés par la
température). Enfin, au niveau de leur Dômes, les calottes glaciaires offrent un écoulement
généralement régulier (hormis peut­-être les couches basales) garantissant la continuité des
enregistrements climatiques et facilitant le travail de datation déduit de la modélisation du trajet des
particules de glace. C'est ainsi que Antarctique et Groenland ont été le siège de nombreuses
entreprises de forage dont les interprétations nécessitent une meilleure compréhension du
fonctionnement des calottes, laquelle s'appuie notamment sur la modélisation numérique.
La synthèse de travail proposée ici s'inscrit pleinement dans l'effort de modélisation des systèmes
glaciaires, qu'il s'agisse d'une contribution à l'amélioration des modèles de calottes dans un premier
temps avec notamment la prise en considération des effets isostatiques ou de la modélisation à
proprement parler des écoulements glaciaires. En effet, comme il sera décrit plus tard, les
réajustements isostatiques sous les calottes glaciaires sont responsables de déplacements verticaux
non négligeables qui obéissent à une géométrie et à une dynamique particulières, lesquelles en retour
influent sur la dynamique glaciaire. A la différence de la majorité des autres contextes de charge à la
surface du globe, les systèmes glaciaires, de par leur forte variabilité (comparée à la lenteur des autres
processus géodynamiques) sont à l'origine d'une réponse terrestre complexe, souvent transitoire et
donc hautement non ­linéaire en temps. Rendre compte de manière précise de la spécificité de cette
dynamique Terre-­Glace requiert donc une modélisation appropriée mais relativement complexe.
Après une description du modèle de réponse terrestre développé puis validé sur les données du rebond
post­glaciaire Fennoscandien, les effets de l'incorporation de l'isostasie dans les modèles d'évolution
des grandes calottes glaciaires sera présenté. En outre, nous verrons comment un tel modèle de
réponse terrestre permet des applications qui sortent du cadre purement glaciaire (ondulations du
plancher océanique sous les volcans marins) et permet aussi de traiter de problématiques purement
géodynamiques comme les ondulations du géoïde, la modification du champ de pesanteur et les effets
associés sur les mesures gravimétriques.
La partie modélisation glaciaire à proprement parler sera ensuite présentée avec un premier exemple
de modélisation de la dynamique particulière des calottes marines. Puis la modélisation d'un glacier
de montagne, faisant usage de l'approximation de la couche mince sera proposée et soulèvera le
problème des conditions d'application de cette approximation. Ces conditions d'application feront
l'objet du paragraphe suivant. Enfin, l'importance de la relation glacier­ climat sera illustrée par une
approche entièrement modélisée du bilan de masse et de ses effets sur le comportement d'un glacier
de montagne.
Cette présentation s'articulera autour le la présentation d'une sélection des publications majeures qui
ont concrétisé ce travail. S'en suivra une description des travaux récents et actuels qui n'ont pas encore
tous donné lieu à publication ainsi qu'une prospective dans le cadre d'un programme de l'Agence
Nationale de la Recherche que je coordonne.